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ON THE ROAD AGAIN

  • Vincent Bordenave
  • 8 mai 2016
  • 3 min de lecture

Le temps passe vite. Il y a deux semaines, Jenny avait l’estomac noué en attendant sa famille dans le petit aéroport de Perth. Elle était à la fois excitée par les quinze jours qui s’offraient à elle aux côtés de sa mère et de sa grand-mère. Mais elle était aussi anxieuse à l’idée, qu’après ce court temps de vacances, elle ne les verrait plus pendant six mois. Il y a six mois, ils étaient deux à avoir l’estomac noué en prenant l’avion qui les amenait d’abord à Tokyo puis en Australie. Six mois que Jennifer et Vincent sont partis, deux

semaines que la mère et la grand-mère de Jenny sont arrivées... tout juste le temps de réaliser.

Au volant de la voiture qui les conduit à l’aéroport de Perth, Jennifer retient ses larmes et tente de se rappeler les bons moments. Difficile de choisir... “Qu’est-ce que j’ai préféré pendant ces deux dernières semaines ? Qu’est ce que j’ai préféré durant ces six derniers mois ? Impossible de savoir. Il y a tant de choses.” Arriver à destination ils partagent ensemble une dernière bière. Jennifer ose poser sa question : “Et vous qu’est-ce que vous avez préféré de vos deux semaines en Australie.” Sans hésiter une seconde, sa mère et sa grand-mère répondent en chœur :

« Te revoir après six mois d’absence. – Je ne parle pas de ça ! Non, je veux savoir ce que vous avez préféré dans le voyage. Quel lieu vous a le plus marqué. La grotte de Wave Rock ? Les kangourous ? – Moi je serais bien restée quelques jours à Margaret River, j’aime la mer et une tempête ici, ce doit être incroyable » répond sa grand-mère. – Moi, j’ai beaucoup de mal à choisir, je me suis sentie au calme dans les forêts d’eucalyptus, ça sent bon et on y a vu nos premiers kangourous mais le coucher de soleil aux pinacles était tout de même irréel » renchérit sa mère. Jennifer repart dans ses pensées. Elle ne veut pas que cet avion décolle mais elle sait qu’invariablement chaque seconde qui passe la rapproche des au revoir tant redoutés. Alors elle essaie de profiter. Elle boit sa bière le plus lentement possible. Pendant deux semaines, elle est redevenue une enfant que sa mère amène en vacances. Elle a visité une grotte avec des traces de mains, une autre avec des stalagmites et stalactites près de Margaret River, elle a dormi dans un chalet au milieu de nulle part avec des kangourous pour seuls voisins. Tout ça, elle sait bien qu’elle pourra le faire à nouveau, car elle, elle reste en Australie. Mais ce qui lui avait plu à Jennifer, c’est de ne pas avoir à se poser de questions et de pouvoir partager sa nouvelle vie avec les gens qu’elle aime.

Demain dimanche, l’avion aura décollé. Il va falloir replanifier la suite de leurs aventures, retourner à Coles acheter du corned-beef et des noodles. Ensuite, ils reprendront la route, mais cette fois, ils dormiront dans leur tente qu’il faudra déplier chaque soir et replier chaque matin. Au fond d’elle-même, elle est partagée. C’est à la fois excitant cette aventure qui recommence à deux, et pourtant elle a la même sensation que si elle rentrait de colo. Heureuse de retrouver ses habitudes mais triste de mettre fin à deux semaines de laisser-aller.

Depuis six mois, elle a l’impression de ne pas arrêter de dire au revoir. Depuis six mois, ce sont d’éternels adieux qui se répètent inlassablement. Voyager c’est dire au revoir. Au

revoir à ceux qu’on laisse en France. Au revoir à ceux que l’on croise au hasard des routes. Au revoir à ceux qui viennent nous voir. « Jamais je n’aurais pensé que ça pouvait être aussi difficile. » se lamente-t-elle. Ce soir, elle dit au revoir à sa famille, demain elle dira au revoir à Perth. Ils prennent la route vers le nord. L’hiver approchant, plus près de l’équateur ils seront, meilleur sera le climat. Ils partent sans trop de regrets car à part une proposition faite a Jennifer pour faire des massages ou des ménages toute nue en échange de 120$ de l’heure, ils n’avaient pas franchement trouvé de travail. Il faut dire qu’ils n’avaient pas franchement cherché, mais bon pas de regret à avoir : les températures automnales les auront poussés sur la route.

« Bon, ben il va être l’heure pour nous ! intervient Isabelle. – Quoi déjà ! » répond Jennifer tout juste sortie de ses songes. Pas le temps de finir sa bière. Un dernier câlin et Jennifer voit sa mère et sa grand-mère s’éloigner dans le couloir les amenant au poste frontière. Dans six mois, elle aussi sera rentrée en France. Dans six mois, elle reverra sa famille. Ça passe vite six mois, mais on ne peut pas s’empêcher de se dire aussi que c’est un peu long quand on sait que, cette fois, le temps des visites est derrière nous.


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