LES YEUX JAUNES DES CROCODILES
- Vincent Bordenave
- 16 juil. 2016
- 3 min de lecture
Jennifer et Vincent sont un peu inquiets. Il faut dire que les flammes qui les entourent n’ont rien de très rassurant. Alors certes, le Ranger leur a dit qu’il n’y avait aucun danger à dormir ici, que c’était lui qui avait allumé le feu. Mais entendre le bruit de bois crépiter à moins de 20 mètres est un peu anxiogène. D’autant que juste en face un autre feu vient de démarrer, et que là, le Ranger n’y est absolument pour rien. Autour d’eux les autres campeurs ne semblent pas s’en émouvoir. Comme si c’était quelque chose de normal que de voir le bush cramer comme ça.
Bon an mal an, ils vont quand même être obligés de dormir ici ce soir. La soeur de Vincent arrive dans deux jours à Darwin, ça fait trois jours qu’ils ont laissé Broome et qu’ils ont parcouru 2000 km. Ils en ont un peu marre de rouler et ont envie de se reposer avant de passer une journée au Lichfield national Parc. Pendant 3 jours ils en ont vu défiler des paysages. Leur petite voiture ne leur permettant pas d’emprunter les chemins escarpés de la légendaire Gibbs River road, ils n’ont pas vraiment pris le temps de s’arrêter. A part les stops obligatoires dans les stations services des villes sans charme qui parsèment la route.
Miraculeusement leur voiture tient toujours. Deux mille bornes sans une crevaison, sans un ennui mécanique, ça paraît presque trop facile. Même avaler le décalage horaire n’a pas posé trop de problèmes. Seuls les troupeaux de vaches qui, ça et là, encombrent l’asphalte peuvent représenter quelques difficultés. Une journée entière pour profiter des rivières (sans crocodiles) du Lichfield national parc n’est pas de trop pour récupérer de cette lente monotonie. D’autant que les parcs nationaux du nord sont tous gratuits (à l’exception de Kakadu et Uluru). Les balades sont rares mais l’eau y est rafraîchissante. Lichtfield c’est un peu comme Disney Land, Mickey Mouse en moins. Les cars affluent pour admirer les termitières magnétiques. (Orientées vers le nord de manière à exposer le moins de surface possible au soleil). Les darwiniens (il s’agit ici des habitants de Darwin et non des adeptes de la théorie de l’évolution) viennent se dorer la pilule et profiter des nombreuses cascades pour fuir un peu les chaleurs tropicales. L’eau est froide mais la trempette est plus que bienvenue. D’autant que le vendredi matin il faudra se lever à 4h pour aller chercher Lise à l’aéroport.
Darwin est une ville agréable. Idéale même pour se remettre d’un long voyage et du décalage horaire. Lise arrivée, la matinée est passée à flâner dans un des nombreux marchés de la ville, avant de trainer dans un café pour prendre un « breakfast ». Et quand la température devient trop chaude un petit plongeon, soit dans la petite plage du centre ville, soit un peu loin pour fuir le monde. Malgré tout, Lise est un peu décontenancée. Il faut dire qu’arriver à Darwin est un peu surprenant. On n’est pas vraiment sûr d’être sur le bon continent. La ville est plus proche de l’Asie que de Melbourne, le “way of life” aussi. Les restaurants asiatiques sont légion. Les échoppes des marchés proposent plus de rouleaux de printemps que de kangourous meat pie.
Mais trente minutes de voiture vous ramènent rapidement dans l’Outback australien et ses rivières infestées de crocodiles. Une ballade sur l’Adélaïde river décourage toute idée de faire trempette. Les yeux jaunes vous observent de partout, et dès que quelque chose vient se heurter à l’eau et provoquer des ondes les mâchoires sortent de l’eau et
claquent ! A tel point qu’on en devient parano avant de choisir un lieu pour dormir. Quand Jenny, Lise et Vincent arrivent sur un campement ils doivent s’assurer qu’il n’est pas déjà occupé par ces énormes reptiles. Sinon ils sont obligés de faire demi tour. Il faut dire que les tentes en toiles n’offrent pas la meilleure protection. Et quand un crocodile de deux mètres de long vous observe tranquillement depuis l’autre rive il est préférable de trouver un autre endroit !
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