top of page

COMME UN POISSON DANS L'EAU


Vincent est songeur. Les palmes aux pieds, le masque sur le nez, il réfléchit. “Dans quatre jours, Lise sera partie, il ne nous restera plus que deux mois en Australie...” Deux mois, ça passe vite. Deux mois pendant lesquels il faudra longer toute la côte Est pour arriver à Melbourne et espérer vendre la voiture avant d’embarquer, sur un vol Jetstar, en direction de Christchurch. Plus que deux mois et les questions commencent à se bousculer. Leur reste-t-il assez d’argent ? Auront-ils le temps de trouver du travail et surtout, vont-ils passer les deux prochains mois à dormir sous la tente ? “En plus il ne faut pas descendre trop vite, si on arrive trop tôt à Sydney on sera au cœur de l’hiver et bonjour le temps pourri !”

En attendant le grand départ, Vincent plonge dans les eaux tièdes de la côte est australienne, les yeux ébahis par le spectacle multicolore de la Grande Barrière de corail. Il y a deux mois, ils en avaient eu un rapide aperçu en plongeant dans les eaux de Turquoise Bai, mais aujourd’hui le spectacle est sans comparaison. Les poissons sont plus nombreux, plus gros, plus beaux. Les coraux plus colorés et dessinent, sous l’eau, des reliefs incroyables. Dommage quand même que l’équipage du bateau confonde un peu la visite du “reef” avec l’organisation d’une colonie de vacances... Cette atmosphère finit par légèrement agacer Lise qui, si elle a trouvé le repas du midi ”plutôt correct”, aimerait qu’on la laisse un peu tranquille et qu’on arrête de la déranger pour la prendre en photo faisant le poisson ! Les colos, c’était sympa quand elle était petite, mais là ça la fatigue un peu... Pas de quoi gâcher la journée tout de même ! ”C’est la Grande Barrière de corail, ça vaut bien ça !”






De son côté, Jennifer regarde son pied. Ça fait maintenant deux jours qu’elle se sent patraque, heureusement elle a eu droit à un anti vomitif pour le trajet en bateau ce qui lui permet de passer une journée en gardant son repas dans l’estomac. Mais voila qu’un animal inconnu vient de lui piquer le pied et des petits points noirs se multiplient d’un seul coup autour de la piqure. L’équipage circonspect regarde son pied se transformer sans trop savoir quoi faire. Faute de mieux, ils choisissent de l’asperger d’un peu de vinaigre et advienne que pourra. A côté d’elle, un touriste américain explique à qui veut l’entendre pourquoi il faut voter Trump.

Arrivés à Cairns, fini le camping ! Les trois voyageurs passent les derniers jours de Lise dans l’hémisphère sud dans une guest house à deux pas du centre-ville. Mais pendant que frère et sœur passent leur journée à la plage, Jenny reste clouée au lit. Sa seule sortie consiste à marcher jusqu’au centre commercial pour voir un médecin. Les journées sont longues, d’autant que les autres pensionnaires ne sont pas très émus par son état de santé et ne se privent pas de faire du bruit l’empêchant donc de dormir. Les odeurs de cuisine asiatique émanant de la salle commune lui donnent la nausée, mais se déplacer jusqu’aux toilettes pour vomir ne ferait qu’empirer la chose. Heureusement tout finit toujours par s’arranger, après plus de 600 $ de frais médicaux et divers examens, son médecin finit sagement par conclure : “Il doit s’agir d’un virus, tout ça devrait s’arranger tout seul. C’est juste une question de jours.”

Pendant ce temps, l’avion de Lise s’apprête à décoller. Quarante deux heures de voyage avant d’atterrir à Paris-Charles-de-Gaulle ! Les deux derniers jours à Cairns ont été reposants. Prenant même le risque de se baigner (sous surveillance) dans des eaux infestées de requins, crocodiles et méduses tueuses ! Si les après-midi farniente sur la plage ont achevé de donner à sa peau une couleur rouge écrevisse, les dernières promenades dans les forêts tropicales des alentours et l'atmosphère animée des soirées sur l’esplanade de Cairns lui permettent d’appréhender au mieux son long trajet.

Une fois Lise partie, Jennifer et Vincent doivent préparer la suite. Ils vont reprendre la route vers le nord, d’abord, pour se rendre à Cap Tribulation avant de redescendre doucement. Pour ça il faut d’abord laisser à Jennifer le temps de se remettre de ce maudit virus. L’escale à Cairns est bienvenue et permet de se ressourcer, de nettoyer et de vérifier l’état de la voiture qui, en un mois, a quand même roulé plus de 5000 kilomètre. D’autant que l’épaisse fumée blanche qui, accompagnée d’une drôle d’odeur, s’échappe du capot à l’avant n’a rien de très rassurant... Sans doute qu’en voulant remettre de l’huile dans le moteur, Vincent en aura versé un peu à côté. Espérons en tout cas, sans quoi rejoindre Melbourne pourrait s’avérer plus compliqué que prévu.


bottom of page